DAC 8 : La règlementation européenne se muscle en matière de crypto-actifs

La lutte contre la fraude fiscale à l’échelle internationale constitue un objectif premier depuis de nombreuses années pour les instances européennes. Afin de limiter les opportunités de fraude et d’effrayer les potentiels fraudeurs, plusieurs mesures ont été mises en place au cours de la dernière décennie pour faire de l’échange automatique de renseignements en matière fiscale entre les États membres un automatisme.

Au cours des dernières années et depuis la création des crypto-actifs, des plateformes permettant d’opérer sur cette nouvelle catégorie de biens échappaient à toute régulation car elles n’entraient pas dans les définitions légales en vigueur. Grâce à ce vide juridique, de nombreux utilisateurs de ces plateformes ont pu réaliser un certain nombre d’opérations, et de gains, tout en omettant de déclarer ces gains.

Si la législation fiscale française s’est penchée depuis plusieurs années déjà sur la régulation des actifs numériques, le manque de clarté sur les opérations passées via les différentes plateformes empêchait une réelle efficacité de la législation. Une réflexion était donc menée au niveau de l’Union européenne pour tenter de limiter les abus en adoptant des définitions communes permettant de clarifier l’identité et le rôle de chacun des acteurs.

1. Cadre de Déclaration des Crypto-Actifs : la clarification des définitions

Le 10 octobre 2022, l’Organisme de Coopération et de Développement Economiques (OCDE) publiait un cadre pour faciliter la transparence en matière d’opérations sur crypto-actifs. La mise en place de ce cadre est attendue pour 2025 au plus tard dans les différents pays membres de l’Union.

Ce cadre permet de poser une définition sur les entités impliquées dans les opérations de crypto-actifs et notamment les plateformes, appelée “CASP” (Crypto Asset Service Provider) définies comme : “toute personne ou entité qui, dans le cadre de son activité, fournit des services d’échange, pour ou au nom de ses clients, y compris en agissant en tant que partie ou intermédiaire dans des transactions, ou en fournissant une plateforme d'échange.”

Il était précisé, dans ce cadre, que les CASP devraient déclarer aux autorités fiscales de leur juridiction des informations concernant l’identité de leurs clients, ainsi que les bénéficiaires des transactions réalisées, ainsi que toute information sur la nature des transactions.

2. Le règlement MICA : la protection des utilisateurs

Publié au Journal officiel de l’Union européenne du 9 juin 2023, ce texte est entré en vigueur le 29 juin 2023 mais ses dispositions seront réellement applicables à partir du 30 décembre 2024 (certaines dispositions, relatives aux stablecoins, entreront en vigueur le 30 juin 2024).

Ce nouveau règlement s’inspire du règlement MIF 2, applicable aux instruments financiers et permet de réguler le marché des crypto-actifs grâce à plusieurs mesures : 

  • Le règlement exige une certaine transparence concernant l’émission, l’offre au public et l’admission à la négociation des crypto-actifs sur les plateformes de négociation des crypto-actifs. 

  • Le règlement demande un agrément et une surveillance des prestataires de services sur crypto-actifs. Il requiert également une surveillance sur leur fonctionnement, leur organisation et leur gouvernance.

  • Le règlement exige des mesures de protection concernant les détenteurs de crypto-actifs utilisant ces plateformes.

  • De manière similaire aux mesures existantes relatives aux instruments financiers, le règlement instaure des mesures visant à prévenir les opérations d’initié, les divulgations illicite d’informations privilégiées et les manipulations de marché afin de garantir l’intégrité de ce nouveau marché.

3. La directive DAC 8 : la mise en oeuvre coercitive du cadre défini

La directive DAC 8 a été adoptée par le Parlement de l’Union européenne le 13 septembre 2023 avec pour objet de favoriser la coopération administrative dans le domaine fiscal en matière de crypto-actifs. La directive reprend les définitions posées dans le cadre visé ci-dessus et confirme la volonté de l’Union d’adopter un cadre législatif uniforme pour sécuriser les opérations. La directive permet une mise en oeuvre effective des mesures énoncées dans le Cadre de Déclaration des Crypto-Actifs. 

La directive pose un principe général de déclaration de toutes les opérations impliquant des crypto-actifs.

A titre de comparaison, actuellement, la France ne requiert aucune déclaration de la part des plateformes concernant les opérations sur crypto-actifs. L’imposition des opérations ne concerne également que les opérations crypto/fiat qui doivent être déclarées par chaque utilisateur (cette déclaration reposant alors sur sa bonne foi).

La transposition en droit interne de cette directive entraînerait la déclaration par les intermédiaires de toutes les opérations, soit crypto/fiat, crypto/crypto ou encore les transferts de cryptomonnaie. Les déclarations réalisées comporteraient le détail des parties impliquées dans les transactions ainsi que des informations sur les actifs utilisés. Cette disposition devra être transposée en droit interne avant le 31 décembre 2025, pour une entrée en vigueur des règles le 1er janvier 2026 au plus tard. 

A compter de cette date, les plateformes identifiées comme CASP devront donc communiquer de nombreuses informations sur leurs utilisateurs aux autorités fiscales des pays de l’Union, à savoir : nom, adresse, Etat membre, numéro d’identification fiscale, date et lieu de naissance, informations relatives aux opérations, valeur, nombre de transactions sur l’années qu’il s’agisse de crypto/fiat ou crypto/crypto.

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