Comment imputer le passif successoral dans une succession avec démembrement ?
Les faits :
A décède et laisse son épouse B, mariée sous le régime de l’ancienne communauté légale des meubles et acquêts et son fils unique C.
B opte pour 100% de la succession en usufruit, et C récupère alors la totalité en nue-propriété.
La déclaration de succession prévoit que la totalité du passif de succession est imputée sur la part du nu-propriétaire.
La problématique :
L’administration fiscale considère que le passif de succession aurait dû être réparti entre B et C et notifie une proposition de rectification à C.
La contestation est portée devant le TJ de Dijon qui fait droit à la demande de C, en considérant que la totalité du passif de succession est imputable sur la part du nu-propriétaire.
La CA vient de débouter l’administration fiscale de sa demande.
La décision :
Selon l’article. 870 du Code civil, les cohéritiers contribuent entre eux au paiement des dettes et charges de la succession, chacun dans la proportion de ce qu’il y prend.
Les premiers juges ont alors considéré que, lorsque la vocation successorale de chacun des héritiers est différente, la contribution de chaque héritier doit tenir compte à la fois de l’étendue et de la nature de ses droits.
Ils ont également déduit de l’article 612 que l’usufruitier n’est pas tenu au passif successoral, mais seulement aux intérêts de ce passif.
Ce faisant, les juges contestent la pratique de l’administration, rappelée dans le BOI-ENR-DMTG-10-50-10 du 11 avril 2016 qui prévoit que :
« En vue de déterminer la part nette revenant aux ayants droit tenus au paiement proportionnellement à leur émolument (héritiers, légataires universels ou à titre universel), le montant total des dettes est déduit de l'actif brut successoral. Les parts nettes sont alors calculées sur le résultat ainsi obtenu.
En présence de légataires particuliers, non tenus au paiement des dettes, les dettes et les legs particuliers sont déduits de l'actif brut successoral. Les parts nettes des héritiers légataires universels ou à titre universel sont alors calculées sur cette différence.
Cette manière de procéder évite d'effectuer la répartition du passif. »
CA de Dijon, 5 septembre 2023, n°21/00745