Opportunité du report d’imposition
Le mécanisme du report d’imposition de l’article 150-0 B ter du CGI peut être utilisé par des actionnaires pour anticiper et/ou optimiser la cession de leurs participations dans une société. Comme bien souvent en fiscalité, l’opportunité de recourir à un tel régime sera déterminée en fonction des objectifs et caractéristiques propres à la situation du client.
Prenons le cas de deux actionnaires détenant chacun 15% du capital d’une SAS. Une modification de l’actionnariat est attendue à horizon N+3, qu’il s’agisse de l’entrée au capital d’un nouvel associé investisseur ou de la sortie de l’un des deux minoritaires. Dans chacun de ces deux cas, les associés pourraient être amenés à céder leurs participations, ce qui entraînerait des conséquences fiscales taxables.
La future cession peut être envisagée sous deux angles distincts :
La cession réalisée directement par les associés (1), entraînant la réalisation de plus-values taxables immédiatement,
Une cession réalisée par le biais de holdings patrimoniales (2) préconstituées ou non en amont de l’opération de cession, bénéficiant du mécanisme du report d’imposition,
(1) La cession directe par les associés
La cession directe des participations entraîne la réalisation de plus-values taxables l’année suivant la cession. En principe, la plus-value réalisée est taxée au prélèvement forfaitaire unique, de 30%, ou, sur option, soumise au barème progressif.
L’application du barème progressif permet notamment au(x) cédant(s) de bénéficier d’abattements pour durée de détention pouvant aller jusqu’à 85% dans l’hypothèse où les détentions sont suffisamment anciennes et ont été acquises à la création de la société cédée.
Dans l’hypothèse où les cédants détiennent leurs participations depuis l’origine de la création de la société, il est alors fortement probable que le prix d’acquisition utilisée comme référence dans le calcul de la plus-value globale soit très faible. La plus-value générée par la cession est alors bien souvent importante, ce qui entraîne une taxation défavorable pour le cédant.
Le mécanisme de l’apport-cession peut alors être envisagé pour alléger le poids de cette imposition.
(2) La cession par le biais de holdings intercalaires
Dans cette hypothèse, les cédants vont anticiper l’opération de cession et apporter au préalable leurs participations à une société spécialement créée pour l’occasion, une holding. C’est cette société holding qui cèdera ensuite les participations dans la société.
Remarque : Il ne nous paraît pas efficace de constituer ici une seule holding pour une pluralité de cédants compte tenu de la diversité d’objectifs qui peuvent être recherchés par chacun des cédants. Il faudra alors privilégier une holding par cédant.
L’apport des participations aux holdings entraînera, pour chaque associé, la réalisation d’une plus-value, en théorie taxable. Toutefois, et compte tenu du montage dans lequel les cédants contrôlent les holdings constituées, les plus-values générées par l’apport seront placées en report d’imposition.
Une question reste en suspens : l’opportunité de créer la holding juste avant la cession ou bien en amont.
Une création immédiatement avant la cession
Dans l’hypothèse où la holding est créée immédiatement avant la cession, une seule plus-value est réalisée, soit la plus-value d’apport par la personne physique, placée en report.
La cession intervenant immédiatement après l’apport déclenche l’imposition de la plus-value en report, sauf en cas de réinvestissement d’une partie du prix de cession.
Une création bien en amont de la cession
Dans cette hypothèse, et en cas de prise de valeur des participations apportées à la holding, la holding va elle aussi réaliser une plus-value imposable lors de la cession.
Toutefois, si la cession intervient plus de trois ans après l’apport initial, seule la plus-value de la holding sera finalement taxée.
Si la cession intervient moins de deux ans après l’apport initial, la plus-value est considérée comme un produit imposable pour la holding, soumise à l’impôt sur les sociétés au taux de 25%. La plus-value de la personne physique sera également imposée.
Si la cession intervient plus de deux ans après l’apport initial à la holding, la plus-value peut bénéficier du régime des titres de participation, soit une exonération sous réserve de la réintégration d’une quote-part pour frais et charges de 12% (taxée au taux de 25%, soit une taxation effective de 3%).
Comme bien souvent en fiscalité, il est impossible de dégager une solution générique. La stratégie du client devra être déterminée en fonction de ses objectifs et de ses capacités.
En matière de report, il faut donc déterminer en amont si le client a des possibilités ou des souhaits de réinvestissement mais également anticiper une cession à plus ou moins long terme.